I Speak to the Night. Je parle à la nuit

Dessin au Fusain. Charcoal Drawing On Paper A4, Fusain Sur Papier A4

Catégorie :

She sits by the window, the tea cooling in her hands. Her children’s laughter echoes through the house, her husband reads quietly in the next room. Everything seems peaceful. Everything is in its place.

But sometimes, in the stillness of this well-ordered life, something stirs. A warm breeze. A memory.

She remembers.

Not an event. Not a word. But a gaze. The gaze of a man from the desert. Eyes like embers — burning without touching, speaking without sound.

They had loved in silence, in stolen glances, in restrained gestures. And then, as life often does, the world decided for them. Parents. Expectations. Paths already drawn.

She married. She built. She gave life. But sometimes, in the hush of night, in the breath of a wind from nowhere, she thinks of him.

She sees his eyes again — dark, fierce, untamed. She sees his hands, his keffiyeh, his solitude. She sees what they never had, but always carried within.

She doesn’t regret. But she remembers.

And in that memory, she is young.

She is free.

She is loved.

 

My dearest,

I don’t know why I’m writing this. You’ll never read it. And maybe that’s the only reason I can finally say these words.

Sometimes, in the quiet moments — when the children are asleep, when the house hums with the soft rhythm of a life I built — I think of you. Not with bitterness. Not with regret. Just… with a kind of longing that has no name.

I remember your eyes. They weren’t gentle. They were fire. They didn’t ask for permission. They simply saw me.

You were the desert — vast, silent, impossible to tame. And I was the girl who wanted to run toward you, barefoot, unafraid. But life doesn’t always allow such things. You know that. I know that.

They said no. And I said nothing.

I married a good man. He is kind. He is steady. We have children who laugh like sunlight. I have a life that looks full from the outside.

But sometimes, when the wind brushes my skin just so, I remember the way you looked at me. As if I was the only oasis in your world.

I wonder — do you still walk the dunes alone? Do you still speak to the wind? Do you still carry me somewhere in the folds of your silence?

I don’t need answers. I don’t need you to come back. I just needed to say: I loved you. I still do, in the quiet way that never asks for anything.

This letter will stay here, folded between pages of a book no one reads. But tonight, I feel closer to you than I have in years.

Yours, always in the wind,

—She

 

I Speak to the Night

 

I speak to the night when all sleeps,

When the walls no longer listen,

When even the wind holds its breath

So as not to disturb my thoughts.

I whisper your name without saying it,

I trace your face in the shadows,

I imagine your steps in the sand

And silences that answer me.

I speak to the night like to a friend,

A confidant with no face or voice,

It knows what

I’ve never spoken,

It keeps what

I cannot share.

I entrust it with burning glances,

With gestures we never dared,

With letters never sent,

With dreams we had to fold away.

I speak to the night, and sometimes,

It returns your memory untouched

— Your eyes, your breath, your quiet voice,

As if time had undone nothing.

And when dawn erases the stars,

I become again a woman, a mother, a wife.

But deep within, in the silence,

I remain the one who waits for you…

And who speaks to the night.

 

I Speak to the Night

An artwork by Kaspin Jacques– Contemporary Art Catalogue

With I Speak to the Night, Kaspin Jacques deepens his exploration of interior silence and emotional memory, offering a work of rare intimacy and restraint. Through a monochromatic drawing, the artist captures a suspended moment: a woman cloaked in shadow, her face half-veiled, her hand gently clutching the fabric — as if holding onto a memory.

Her gaze, barely visible, turns inward. This is not a portrait; it is a quiet confession. The chiaroscuro, rendered with delicate precision, creates tension between what is revealed and what remains unsaid. The piece does not seek to seduce — it seeks to speak, without words, without noise.

The title, I Speak to the Night, acts as a poetic key: it suggests a dialogue with absence, a voice addressed to something that does not answer. The night becomes a mirror of the soul, a vessel for thoughts too fragile to share. The work evokes a woman who remembers — an old love, a man of the desert, eyes like embers — while living another life, surrounded by children, a husband, a daily rhythm that knows nothing of this quiet flame.

Kaspin Jacques questions the duality of existence: can one love without sharing? Can one live without betraying what one feels? The work offers no answers, but opens a space for resonance. It invites the viewer to listen to their own silences, to recognize their own nights.

I Speak to the Night is not a work that imposes itself — it insinuates. It does not shout — it whispers. And in that whisper, each of us may hear what we’ve never dared to say.

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Elle est assise près de la fenêtre, le thé refroidit entre ses mains. Les rires de ses enfants résonnent dans la maison, son mari lit en silence dans le salon. Tout semble paisible. Tout semble à sa place.

Mais parfois, dans ce calme bien rangé, un souffle la traverse. Un vent chaud. Un souvenir.

Elle se souvient.

Pas d’un événement. Pas d’un mot. Mais d’un regard. Celui d’un homme du désert. Un regard qui brûlait sans toucher, qui disait tout sans parler.

Ils s’étaient aimés dans l’ombre, dans les silences volés, dans les gestes retenus. Et puis, comme souvent, la vie avait décidé pour eux. Les parents. Les devoirs. Les chemins tracés.

Elle s’est mariée. Elle a construit. Elle a donné la vie. Mais parfois, dans le creux d’une nuit, dans le souffle d’un vent venu de nulle part, elle pense à lui.

Elle revoit ses yeux — sombres, ardents, indomptables. Elle revoit ses mains, son keffieh, sa solitude. Elle revoit ce qu’ils n’ont jamais eu, mais qu’ils ont porté en eux.

Elle ne regrette pas. Mais elle se souvient.

Et dans ce souvenir, elle est jeune. Elle est libre. Elle est aimée.

 

Mon cher,

Je ne sais pas pourquoi j’écris.

Tu ne liras jamais ces mots.

Et c’est peut-être pour ça que je peux enfin les dire.

Parfois, dans les silences de la maison

— quand les enfants dorment, quand mon mari lit sans bruit, quand le monde semble en ordre — quelque chose me traverse.

Un souffle chaud. Un souvenir.

Je pense à toi.

Pas à un moment précis. Pas à une phrase. Mais à ton regard. Ce regard de feu, celui qui ne demandait rien, mais qui disait tout.

Tu étais le désert — vaste, silencieux, indomptable. Et moi, j’étais la fille qui voulait courir vers toi, pieds nus, sans peur. Mais la vie ne permet pas toujours ces choses-là. Tu le savais. Moi aussi.

Ils ont dit non. Et moi, je n’ai rien dit.

J’ai épousé un homme bon. Il est doux. Il est stable. Nous avons des enfants qui rient comme le soleil. J’ai une vie qui semble pleine, vue de l’extérieur.

Mais parfois, quand le vent effleure ma peau d’une certaine manière, je revois ton regard. Comme si j’étais la seule oasis dans ton monde.

Je me demande — marches-tu encore seul dans les dunes ? Parles-tu encore au vent ? Me portes-tu encore quelque part, dans le pli de ton silence ?

Je n’attends pas de réponse. Je ne veux pas que tu reviennes. Je voulais juste te dire : Je t’ai aimé. Je t’aime encore, dans ce silence qui ne demande rien.

Cette lettre restera ici, pliée entre les pages d’un livre que personne ne lit. Mais ce soir, je suis plus proche de toi que je ne l’ai été depuis des années.

À toi, toujours dans le vent,

—Elle

Je parle à la nuit

Je parle à la nuit quand tout dort,

Quand les murs cessent d’écouter,

Quand même le vent retient son souffle

Pour ne pas troubler mes pensées.

Je lui dis ton nom sans le dire,

Je trace ton visage dans l’ombre,

Je t’invente un pas sur le sable

Et des silences qui me répondent.

Je parle à la nuit comme à un ami,

Un confident sans visage ni voix,

Elle sait ce que je n’ai jamais dit,

Elle garde ce que je ne peux pas.

Je lui confie les regards brûlés,

Les gestes qu’on n’a pas osés,

Les lettres jamais envoyées,

Les rêves qu’on a dû plier.

Je parle à la nuit, et parfois,

Elle me rend ton souvenir intact

— Tes yeux, ton souffle, ta voix basse,

Comme si le temps n’avait rien défait.

Et quand l’aube efface les étoiles,

Je redeviens femme, mère, épouse.

Mais au creux de moi, dans le silence,

Je reste celle qui t’attend…

Et qui parle à la nuit.

 

Je parle à la nuit

Une œuvre de Kaspin Jacques

Avec Je parle à la nuit, Kaspin Jacques poursuit son exploration du silence intérieur et de la mémoire affective, en livrant une œuvre d’une intensité émotionnelle rare. À travers un dessin monochrome, l’artiste capte l’instant suspendu d’une femme enveloppée dans l’ombre — un visage à demi voilé, une main qui retient le tissu comme on retient un souvenir.

Le regard, à peine visible, semble tourné vers l’intérieur. Ce n’est pas un portrait, c’est une confession muette. Le clair-obscur, travaillé avec finesse, crée une tension entre ce qui est montré et ce qui est tu. L’œuvre ne cherche pas à séduire, elle cherche à dire — sans mots, sans bruit.

Le titre, Je parle à la nuit, agit comme une clef poétique : il suggère un dialogue intime avec l’absence, une parole adressée à ce qui ne répond pas. La nuit devient ici le miroir de l’âme, le réceptacle des pensées qu’on ne partage avec personne. L’œuvre évoque une femme qui se souvient — d’un amour ancien, d’un homme du désert, d’un regard braise — tout en vivant une autre vie, entourée d’enfants, d’un mari, d’un quotidien qui ne sait rien de cette flamme silencieuse.

Kaspin Jacques interroge la dualité de l’existence : peut-on aimer sans partager ? Peut-on vivre sans trahir ce que l’on ressent ? L’œuvre ne donne pas de réponse, mais elle ouvre un espace de résonance. Elle invite le spectateur à écouter ses propres silences, à reconnaître ses propres nuits.

Je parle à la nuit est une œuvre qui ne s’impose pas — elle s’insinue. Elle ne crie pas — elle murmure. Et dans ce murmure, chacun peut entendre ce qu’il n’a jamais osé dire.

 

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